La mémoire tyrannique by Horacio Castellanos Moya

La mémoire tyrannique by Horacio Castellanos Moya

Auteur:Horacio Castellanos Moya [Castellanos-Moya, Horacio]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Salvador, Roman historique
Éditeur: Métailié
Publié: 2008-01-14T23:00:00+00:00


Mardi 18 avril

Un détachement de la garde nationale était posté dans la rue devant le pénitencier, avec l’ordre d’empêcher que nous nous approchions. L’atmosphère est lourde : j’ai eu peur et j’ai préféré rentrer à la maison sans attendre les autres. Doña Chayito a appelé ensuite : elle a dit qu’elle avait appris que les gardes allaient rester aux environs du pénitencier pour une durée indéfinie afin d’empêcher notre présence ; elle a également confirmé que les représentants du corps diplomatique avaient été reçus hier soir par le général, qu’ils lui avaient transmis la demande de clémence, mais que le seul engagement qu’il a pris a été d’appliquer la loi. Et j’ai cru à nouveau entendre la voix de Pericles me dire : “L’unique clémence que connaît ‘l’homme’, c’est la garde nationale.” Nous aurons une réunion demain après-midi chez doña Consuelo.

J’ai occupé le reste de la matinée à faire des courses, le cœur serré en pensant à la mauvaise qualité des choses que Pericles doit être obligé de manger. María Elena m’a accompagnée au marché, d’échoppe en échoppe tout le monde profère à voix basse des insultes contre le général, même si la peur est forte. Sur la place Morazán, nous sommes montées dans le taxi de don Sergio ; il a dit qu’il regrettait mon mari, son client préféré.

Je suis ensuite allée au salon de coiffure, je me sentais affreuse, je n’avais pris aucun soin de moi, comme si je me punissais moi-même parce que Pericles est en prison. Silvia, la coiffeuse, m’a raconté qu’elle venait de s’occuper de doña Tina de Avila, l’épouse de don Ramón, le ministre des Relations extérieures, qui lui a assuré que son mari et plusieurs autres ministres aimeraient bien démissionner, mais qu’ils ne voient pas quand ni comment, qu’ils ne sont pas d’accord avec les nouvelles exécutions et qu’ils voudraient que les peines soient commuées, celle du docteur Romero tout particulièrement, mais ils ont peur de le dire à voix haute, parce que le général les accuserait de trahison et exercerait des représailles contre eux. Je n’en doute pas.

En sortant du salon de coiffure, je me sentais comme neuve. Je me suis rendue chez mes parents. J’ai été surprise de voir dans la rue plusieurs jeunes gens portant des cravates noires. J’ai mis maman au courant de mes dernières aventures ; elle m’a conseillé d’être prudente, dit que mon statut de dame respectable n’était pas une garantie, parce que la bête traquée est la plus dangereuse. Je lui ai parlé de ce que doña Tina avait dit à la coiffeuse ; maman était déjà au courant, elle est amie avec doña Tina et aussi avec doña Telma de Escobar, l’épouse du ministre des Finances. Elle dit que la situation serait drôle si elle n’était pas tragique : avant le début des réunions avec le général, la majorité des ministres sont d’accord pour lui dire qu’il serait opportun d’adopter une position modérée et de prendre en compte les conseils des gouvernements amis, mais une



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